Aujourd’hui avait été une journée très chargée, et pourtant, le lundi était son jour de repos.  Elle avait commencé par  un cours de danse au Broadway Center, elle aimait bien participer à leurs classes pour faire un peu autre chose. Les cours de ballet notamment lui permettaient de se vider la tête et ne penser qu’ à la musique. Elle se laissait emporter par la douceur des mouvements. S’était ensuite enchainé un déjeuner avec quelques membres du cast de Back To The Future, où elle avait été rassurée de voir qu’uniquement les comédiens et danseurs étaient présents. Elle n’avait pas envie d’y voir une certaine personne qui aurait rendu ce moment moins agréable. Elle voyait suffisamment Oliver au théâtre pour ne pas devoir le croiser sur son temps libre. Malheureusement, sept mois après, c’était toujours aussi difficile pour elle.

Alors que le reste de l’équipe avait décidé de continuer la journée par un passage au cinéma, Maia s’était excusée de ne pas se joindre à eux et avait pris une autre direction. Elle avait plutôt hâte de revoir son amie. Elle lui avait proposé quelques jours plus tôt de se retrouver pour un tea time, l’un de ses péchés mignons anglais qui lui manquait particulièrement. C’était un vrai moment cosy qu’elle appréciait beaucoup– moment gourmandise réconfortant également.  On lui avait recommandé ce salon de thé un mois plus tôt et elle avait enfin un moment pour le tester. Un petit air anglais devrait plaire à son amie aussi, même si malheureusement, son dernier passage à Londres n’avait pas été aussi bon qu’elle aurait pu l’espérer.

Toutes les deux ne s’étaient que peu vues depuis leur retour à New-York, et connaissant l’histoire compliquée d’Agnes dernièrement, elle s’était dit que son amie aurait certainement besoin de parler un peu.

Après un court trajet en bus, Maia arrive enfin à destination et a déjà des paillettes dans les yeux devant toutes ces boites de thé et ces gâteaux maisons.
Un petit bout d’Angleterre est bien ici. Maia ne boit pas de café (sauf ceux couverts de pumpkin spices ou de caramel qui font qu'on ne sent pas du tout le goût du café), mais c'est une accro au thé depuis bien longtemps.
Elle s’installe à une table proche de la fenêtre, appréciant toujours regarder les rues de New-York qui sont toujours en mouvement, et attend l’arrivée d’Agnes, qui ne tarde peu. Elle se lève pour serrer son amie dans ses bras. “My dear it’s lovely to see you! I hope you’re in the mood for cake. ”

Parfois Agnes se demande si elle n’aurait pas mieux fait de rester en Angleterre. Après tout, elle a su y trouver des opportunités et même si certains New Yorkais pouvaient lui manquer avec toutes ces heures de décalage, elle s’est surprise à plusieurs reprises à rêver d’un nouveau départ dans la capitale anglaise. La situation avec Damian la pèse évidemment, elle mentirait si elle prétendait le contraire, mais elle ne serait pas non plus complètement honnête si elle disait qu’il est la seule et unique raison de sa lassitude. Les années défilent pour Agnès qui voit quelques rides apparaitre sur son visage, et les rôles changer d’envergure, mais aussi certaines situations perdurer malgré ses efforts dans une direction ou dans une autre. Harry est un de ces problèmes qui ne semblent pas trouver d’issue avec le temps qui passe. Il est toujours dans ses pensées, ses thématiques compliquées qui l’empêchent sans doute de réaliser que s’il le lui demandait, elle quitterait Damian sans même y réfléchir. Harry n’est plus marié depuis des années maintenant, mais Agnes ignore si la situation changera un jour de son côté, suffisamment en tout cas pour qu’il envisage de faire un pas dans sa direction étant donné qu’elle même lui a lancé toutes les perches possibles et imaginable au fil du temps.

Quand Maia lui propose de sortir et de prendre un thé chez Tea & Sympathy, elle se laisse tenter. Elle et Maia se sont retrouvées dans cette configuration un peu particulière ou elles ont pu à un moment donner s’ouvrir l’une à l’autre sur les situations complexes dans lesquelles elles sont imbriquées et assez logiquement, une certaine confiance s’est installée. Avec Maia, Agnes peut faire tomber le masque et cesser de chercher à s’enfermer dans un déni qui l’isole finalement de beaucoup de ses proches, y compris Harry.

Agnes prend la direction du petit salon de thé. C’est un endroit qu’elle connaît très bien, petit recoin britannique niché dans les rues de Greenwich Village dans lequel elle se rend souvent avec son meilleur ami lorsqu’ils ont le mal du pays. Malgré l’inflation, les propriétaires se sont évertués à garder des prix corrects et en conséquence, ils ne parviennent pas toujours à rentrer dans leur frais. Agnes et Harry font des dons parfois, et la comédienne espère que l’enseigne survivra encore de belles années, elle a tellement de souvenirs. Quand elle aperçoit Maia, Agnes offre un sourire suivie d’une accolade.

- Hey lovely! Always in the mood for anything with sugar in it… It’s my biggest problem! How have you been doing ? It’s so nice to see you!

Agnes s’installe et jette un regard à la carte qu’elle connaît déjà bien.

- So, back to the future ? How is it going, all considering ?

Agnes n’est pas réputée pour son talent dans l’art de tourner autour du pot, elle sait qu’il y a beaucoup à dire sur le sujet et elle souhaite offrir à Maia l’opportunité de discuter de ce qu’elle a sur le cœur si elle le souhaite.

Cet endroit avait un coté si chaleureux, être entourée de thé et la présence d’Agnes la transporte immédiatement en Angleterre, chez elle. Elle se plait pourtant relativement bien à New-York, la ville elle-même est bien différente de Londres mais elle s’y sent chez elle. Le fait de vivre dans un joli quartier de Manhattan, avec un ami si proche, c’est probablement la meilleure façon de vivre en ayant quitté Londres, cette ville qu’elle aime tant. Elle a trouvé une nouvelle routine – ce qui, quand on la connait bien, est important pour elle. Mais parfois, un petit air Anglais lui fait du bien.

Elle sourit à son amie qui s’installe face à elle et est presque amusée du fait qu’elle entre tout de suite dans la conversation importante. Est-ce qu’elle savait qu’elle avait besoin d’en parler ? Certainement. Elle doit bien se douter que Maia est fatiguée de devoir jouer un jeu, cacher ses émotions, surtout elle qui est hypersensible depuis qu’elle est enfant. Cacher ce qu’elle ressent n’est vraiment pas son fort, et cela lui demande énormément d’énergie. Cela lui fait donc beaucoup de bien de se retrouver avec elle, celle avec qui elle peut s’ouvrir complètement.

“ The show is going great, I am loving playing Jenifer every day and I’m so lucky to be doing it with Chris.”

Elle n’en parle pas trop, car elle sait que la situation chez les Grayson est compliquée et que Damian n’était pas un sujet facile pour Agnes. Elle enchaine donc assez rapidement, préférant laisser le temps à son amie de relancer le sujet si elle souhaite en parler. Elle laisse échapper un léger soupire.

“ Honestly I thought things were getting better with the whole situation with Oliver, but yesterday I overheard Amy, my understudy, saying that he did well leaving me because I didn’t have half the talent or even the face to be with him …”

Elle s’arrête un instant pour regarder la carte des desserts et salive un instant devant la mention de scones with jam. Voilà qui fera du bien. Ce petit plaisir sucré la ramène toujours en enfance et a un côté nostalgique réconfortant. Son père faisait de la confiture maison et des scones à tomber par terre.

“I know it’s jealousy, but shouldn’t we be more supportive of each other between women ? ”

Leur milieu est très compétitif, elle le sait très bien. C’est quelque chose pour lequel on les prépare très vite. Et pourtant, Maia avait toujours grandit dans l’idée qu’il fallait se soutenir entre femmes. Sa mère avait eu une éducation très positive à ce sujet et la jeune femme a grandi entourée de femmes passionnées et inspirantes. Elle a beau avoir pris un gros coup depuis son arrivée à Broadway et réalisée que clairement, entre femmes on est loin d’être sympas, entendre ce genre de remarques lui fait toujours beaucoup de mal. Peu importe que ce soit véridique ou non.

Elle aurait aimé lui lancer une pique, quelque chose pour lui clouer le bec, seulement elle pense sincèrement que ce n’est pas la solution. Et elle s’est jurée de ne pas réagir à tous ces commérages car si elle montre que ça la touche, ce serait comme avouer qu’elle a effectivement eu une histoire avec Oliver.

Agnes est assez directe et souvent, on peut la surprendre a se mordre la lèvre alors qu’elle vient de mettre les pieds dans le plat de façon un peu brusque pendant une conversation. De nature impatiente et authentique, Agnes éprouve les plus grandes difficultés du monde à jouer les petits jeux auxquels s’adonnent les gens qui pour elle manquent d’empathie et de sincérité. Agnes souhaite savoir comment se sent son amie et elle sait qu’aborder le sujet directement plutôt que de lui demander si elle va bien engendrera quelque chose de plus profond qu’une discussion sur la météo ou la qualité de la compagnie aérienne avec laquelle elle a voyagé. Ces sujets ne la dérangent pas en réalité, mais Agnes souhaite montrer qu’elle n’est pas là pour siroter son thé et ignorer les événements qui se produisent dans la vie de ses proches. Agnes a beaucoup de connaissances, mais peu d’amis, elle prend donc naturellement soin de ceux qui compte, se battant contre ses tendances a parfois monopoliser la conversation pour partager ses expériences avec un peu trop d’entrain…

A la mention de Chris, les pensées d’Agnes se dirigent évidemment vers Damian qu’elle ignore sauvagement depuis qu’elle est rentrée. Un soupçon de culpabilité l’envahit, mais elle tente de chasser ce sentiment pour se concentrer sur ce qui importe, Maia en l’occurrence. L’histoire de l’understudy, la met en rogne évidemment. Le milieu est extrêmement compétitif et Agnes sait mieux que quiconque l’effet que cette réalité peu avoir sur le comportement des uns et des autres. Tout comme son amie, elle aimerait que les femmes s’entraident et fassent preuve de compassion et solidarité, mais ces valeurs peinent vraisemblablement à entrer dans les mœurs.

- Darling, your face is perfectly fine believe me, this Amy is unprofessional and that’s probably why she didn’t get the part. As for the others, they don’t know what they are talking about. You’ve been working in ensembles for years, carrying out 8 shows a week, switching roles last minute and having to remember all the lines and harmonies at once like many of us do when we start that job. Being a leading lady is not about putting anyone else down in the process. She’ll learn that in time, but it’s mostly about having the stamina to carry out all those performances and the humility not to treat anyone like they are less than what they are, team members…

Avec sa longue carrière derrière elle, Agnes est fatiguée de ces querelles. Plus jeune, elle était extrêmement compétitive, et peut être s’est-elle laissée emporter dans un premier temps a juger certains castings alors qu’elle jouait elle même des doublures, mais avec l’âge et l’expérience, elle a bien compris que même si les producteurs ne sont pas les être les plus impartiaux du monde et que leur attention peut être facilement détournée par de jolies boucles et un peu de rouge à lèvre, faire de l’argent reste la priorité absolue et ils n’embaucheraient pas une personne incapable de composer avec la pression associé à un rôle principal.

- No matter what anyone has to say about it, no matter Oliver or the context, you deserve this Maia. People will always have something to say about everything you do. Look at me for example, just browse the internet and you should see a couple of “overrated” next to my name. It hurts but you’ll learn to ignore all this. You’re on stage with a very good friend and you need to make the most of it. This is just background noise.

Mais Agnes, reconnaît à quel point il est difficile d’ignorer ce bruit de fond qui accompagne chaque succès, chaque victoire.

- I’m sure your dressing room is already filled with flowers and gifts!

Peu de personnes peuvent comprendre la réalité du monde du spectacle, alors il est parfois difficile de trouver une personne en qui se confier. Quelqu’un qui comprend ce que vous ressentez, qui ne vous jugera pas avec des « non mais de quoi tu te plains, tu vis ton rêve, tu es sur scène tous les jours » suivi assez souvent d’un « alors que moi, j’ai passé six heures en réunion aujourd’hui pour un sujet qui aurait pu tenir en deux emails. », histoire de renforcer la culpabilité. Mais ce n’est pas parce qu’on fait un métier que l’on aime passionnément que tout est merveilleux. Leur métier est de faire rêver, d’emporter l’audience dans leur univers, leur histoire, et les faire vibrer avec leurs voix, leurs mouvements, leurs émotions. Et c’était magique, mais ce n’était pas un rêve, cela restait un travail, avec toutes les difficultés de la vraie vie.

Heureusement, il n’y a pas que de la jalousie et de la compétition autour d’elle. Si elle ne peut malheureusement plus se confier à Oliver comme elle l’aurait souhaité, elle avait forgé de nouvelles amitiés depuis son arrivée à New-York, créer des liens très forts avec quelques membres de la compagnie. Ils vivent dans leur bulle, et la plupart se soutiennent. Anciennes amitiés renforcées par la proximité, nouvelles connaissances. Les quelques mois de répétitions avaient été intenses, épuisants, et pleins d’émotions.

" Yes, I think doing a job as intense as this requires a strong body and mind. It can be a lot and I think some people unfortunately don’t have that strength and try to blame the others … "

Elle avait suivi la carrière de son amie depuis fort longtemps, elle l’admirait bien avant qu’elles ne fassent connaissance, et elle sait donc les difficultés qu’elle a rencontré en particulier ces dernières années. Elle n’avait jamais vraiment compris d’ailleurs, pour elle, Agnes est l’une des personnes les plus talentueuses qu’elle connaisse. Mais on ne peut pas plaire à tout le monde, et en choisissant un métier si expose aux critiques, on sait dans quoi on s’engage. Cela ne rend pourtant pas les choses plus faciles.

" You’re absolutely right. Can't believe there are people who would say that about you, you'e incredible. But yeah, it’s not easy to ignore all the hate, but at the end of the day what matters most is that we love what we do, and we’re lucky to be surrounded by some amazing friends. It’s funny when I think about it, I’ve looked up to you for years and now look where we are now. The best would be to share the stage together, someday. "


L'idée de faire partie de la même compagnie un jour la fait sourire.

" Yes I’ve actually received some lovely letters since I started on Broadway, even some from people in London whishing me good luck and saying they’ll come see me on Broadway. It’s so sweet. I usually take some time when we have a double show day to answer to those letters, just a little thank you. "


Elle se sent mieux, Maia. Son amie lui avait rapidement fait retrouver le sourire, et elle en oublie tous ces points négatifs. Son hypersensibilité fait aussi qu’elle absorbe facilement toutes les bonnes ondes qu’on peut lui transmettre.

" So my dear, what about you, how are you doing since you moved back here ? "

Agnes hoche la tête en écoutant Maia, elle voudrait pouvoir lui dire que l’avenir sera bien plus positif sur ce point, mais la compétition est néanmoins un élément qui ne disparaît jamais vraiment de leur paysage. Agnes compense cet aspect de son métier en s’entourant de personnes de confiance, mais il est vrai que ce n’est pas toujours évident d’obtenir cette balance sur la scène de Broadway entre les rivalités et les opportunités limités. En réalité, elle se retrouve tout de même fréquemment entourée d’hommes plutôt que de femmes, même si la rousse refuse d’abandonner l’idée d’amitiés professionnelles féminines qui ne soient pas entachées par tout cette culture qui donne aux femmes la sensation que pour exister, elles doivent impérativement écraser celles qui pourraient briller davantage. Agnès souhaite toutefois offrir un peu d’espoir dans tout cela et lui rappelle l’essentiel.

- Just do the work, keep going going, people won’t shut up, but you don’t have to listen to all the voices.

Un peu ironique sans doute, Agnes est la première à éprouver les plus grandes difficultés du monde à ignorer le brouhaha ambiant, mais avec les années, elle a toutefois réussi à focaliser son attention, aussi limitée soit-elle, sur ce qui compte réellement et fait la différence. La détermination et la passion qu’elle met dans son travail, la sauve des doutes qui l’assaillent parfois. Il y aura toujours des gens meilleurs qu’elles, d’autres pour critiquer, mais Agnes ne pourra jamais regretter de ne pas avoir mis tout son cœur à l’ouvrage. Si Maia est encore a l’aube de sa carrière, elle a la tête sur les épaules et le mental requis pour exceller dans ce qu’elle fait.

La rousse sourit alors que Maia lui parle de ses premières lettres de fans. Dix ans auparavant Agnes consolait son cœur meurtri par une énième déception amoureuse avec les lettres et les fleurs qui avaient trouvé leur chemin jusqu’à sa loge.  Le positif existe bel et bien, et il est essentiel de savoir le reconnaître lorsqu’il perce à travers les embûches et obstacles qu’elles peuvent rencontrer en tant que femmes dans cette industrie.

- Thats a lovely feeling savour it, and I really hope we get to share a stage one day. We should make that happen!

A sa question sur sa vie personnelle, Agnes prend une nouvelle gorgée de thé. L’habitude voudrait l’armer d’un sourire suivi d’un discours édulcoré et mensonger sur sa relation avec Damian, mais avec la fatigue et les années, Agnes éprouve les plus grande difficultés du monde à donner le change et a bercer le monde, elle comprise, des illusions qu’elle sert habituellement et qui ne prennent plus vraiment avec le temps. Maia a assisté à ses révélations peu glorieuses il y a des années de tout cela, et si quelqu’un pourrait comprendre son dilemme, c’est bien elle. Cela fait bien dix ans après tout et l’américaine se sent comme le personnage de Laura Linney dans love actually, incapable de prendre la décision d’avouer ses sentiments pour un certain anglais qu’elle voit pourtant tous les jours. La situation est un peu pitoyable, même si Agnes s’est conforté avec des excuses et le déni jusque là. Contre toute attente, elle prend une inspiration.

- Chaotic… Mostly because I should act like I care about being cheated on but I don’t ? I don’t love him and it took me a while to admit it to myself but here we are. He wants to fix our relationship but… I want to be with Harry Fletcher. Let’s face it, he’s the one I should be with. I just don’t know how to tell him how I feel ? It feels like I have tried so many times and he just doesn’t see it or doesn’t want to see it, I don’t know. Everyone else does but not him…

Agnes se sent déboussolée, mais pas pour les raisons qui auraient du sens dans sa situation. A presque quarante ans, elle aimerait pouvoir construire quelque chose, mais son cœur refuse de renoncer à la fin parfaite de la comédie romantique qu’elle a planifie dans sa tête. Harry ne fera pas de pas vers elle cela dit, et en réalité c’est elle qui agit étrangement finalement. Agnes n’a jamais retenu sa langue lorsqu’il s’agissait d’exprimer les élans de son cœur et aujourd’hui son comportement n’a pas plus de sens qu’il y a dix ans.

- I love him so much it’s killing me…